“une nuit de cauchemar lucide. . . . une croisade, un chaos”

“J’ai beaucoup pensé à vous l’horrible dimanche 15 [octobre], où j’ai trouvé dans la Nazione les nouvelles d’Allemagne.

Moi-même j’en ai été, le froid subit aidant, un peu malade, transie, incapable de lire ou de sortir, au coin du feu; puis une nuit de cauchemar lucide, que j’ai dû combler en lisant des drôleries de Sterne dans ˆTristram Shandyˆ. Dans cet état de cauchemar j’ai revécu beaucoup de 1914. Les citations de journaux parisiens semblaient menacer une croisade, un chaos. Les nouvelles d’aujourd’hui calmantes, un sursis.

J’ai beaucoup pensé à vous, chère Berthe, ce Dimanche là (je venais justement d’achever mes 77 ans !). Non pas à cause de peur de guerre qui aurait pu vous venir. Mais —cela vous semble peut-être fantastique—parce que je ressentais pour vous les souffrances causées par l’atmosphère moral [morale] autour de vous : l’horrible régime de haine, de peur, d’affolement ; pire encore peut-être la sensation de solitude…”

Lettre de Vernon Lee à Berthe Noufflard, 18 octobre 1933. Inédit. (Extrait)

Note: 14 octobre 1933 : L’Allemagne quitte la Société des Nations et se retire de la conférence de Genève sur le désarmement. Le discours de Hitler est publié dans la presse en France et en Italie le 15 octobre 1933.

“last night, like a lucid nightmare. . . . a crusade, chaos”

“I thought a lot about you on this horrible Sunday 15 [October], when I read the news from Germany in the Nazione.

With the sudden cold, it made me quite sick, chilled to the bone, unable to read or to go out, frozen by the fireside; then the night was a lucid nightmare I had to fill reading Laurence Sterne’s drolleries in Tristram Shandy. In this nightmarish state I lived again much of 1914. The extracts from parisian newspapers seemed to threaten a crusade, chaos. Today, soothing news; a respite.

I thought of you a lot, dear Berthe, that Sunday (I had just completed my 77 years!). Not because you might be scared of an impending war. But –this will perhaps seem fantastic to you– because I sympathised with the sufferings caused by the moral atmosphere around you: the horrible regime of hatred, fear, panic; worse even, perhaps: the sensation of loneliness…

Letter of Vernon Lee to Berthe Noufflard, October 18, 1933. Unpublished. (Extract)

Note: On October 14, 1933, Germany withdrew from the League of Nations and the World Disarmement Conference. Hitler’s speech was published on October 15, 1933 in French and Italian newspapers.

Vernon Lee, lettre à Berthe Noufflard, Archives Langweil-Halévy-Noufflard, 18 octobre 1933, 1r

Vernon Lee, lettre à Berthe Noufflard, Archives Langweil-Halévy-Noufflard, 18 octobre 1933, 1v
Vernon Lee, lettre à Berthe Noufflard, Archives Langweil-Halévy-Noufflard, 18 octobre 1933, 2r
Vernon Lee, lettre à Berthe Noufflard, Archives Langweil-Halévy-Noufflard, 18 octobre 1933, 2v

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1 Response to “une nuit de cauchemar lucide. . . . une croisade, un chaos”

  1. Christa Zorn says:

    Thank you for the timely posting.

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